La terre se couvre d'une nouvelle race d'hommes à la fois instruits et analphabètes, maîtrisant les ordinateurs et ne comprenant plus rien aux âmes, oubliant même ce qu'un tel mot a pu jadis désigner.
Quand quelque chose de la vie les atteint malgré tout - un deuil ou une rupture -, ces gens sont plus démunis que des nouveaux nés. Il leur faudrait alors parler une langue qui n'a plus cours, autrement plus fine que le patois informatique.
Christian Bobin- Ressuscité
Du latin Ruptura
Action de rompre ou de se rompre, résultat de cette action, interruption qui affecte brutalement le cours de sentiments, de situations, d'événements inscrits dans la durée.
Dans les dictionnaires et lexiques de sciences humaines, le mot rupture n’existe pas seul, il est accompagné d’un autre élément : Rupture d’amour, d’anévrisme, de contrat et même épistémologique... Souvent liée au conflit, la rupture porte une force négative et, par son coté brutal, peut susciter, chez l’homme, la peur.
Synonyme de rupture, on trouve le mot fracture qui désigne, dans la société, « le fossé qui sépare une partie de la population bien intégrée avec une autre constituée de personnes socialement exclues, victimes de l’exclusion sociale ».
Un thème récurrent dans les médias, et qui était devenu, en 1995, un argument majeur de Jacques Chirac dans sa campagne présidentielle. « Notre bataille principale a un nom : la lutte contre le chômage. La sécurité économique et la certitude du lendemain sont désormais des privilèges. Je n'accepte pas de voir près d'un million de nos compatriotes contraints de vivre du RMI et je n'accepte pas de voir l'exclusion de ces cadres approchant la cinquantaine »
Rupture... Pour une innovation ?
Dans Les Mots et les Choses, Michel Foucault qualifie la rupture, de passage d'un épistémè - ensemble de savoirs possédés par une société - à une discontinuité, une mutation, un évènement radical...
Aussi, pour les structuralistes, le mot rupture confère-t-il intelligibilité aux mutations culturelles. « A un moment de l'histoire, dans une culture donnée, les manières de penser sont relativement homogènes, puis elles changent pour se recomposer d'une autre manière à l'époque suivante. »
Dans rupture, il y a donc l’idée de rompre qui introduit l’occasion d’un nouveau départ.
En anglais, une disruptive innovation aboutit à la création d’un nouveau marché. Reliée à l’innovation, la rupture devient donc positive, optimiste, créative... volontaire voire volontariste.
Rupture technologique et DRH Augmenté
Dans l’ouvrage collectif, DRH, le Choc des ruptures, Edgard Added dialogue avec les plus grands DRH de France sur les enjeux de la transformation digitale pour les ressources humaines. Il nous confirme que les ruptures peuvent êtres saines. Voici quelques extraits sur le thème :
Le DRH de Atos France, Jean-Marie Simon, rappelle ainsi que « les DRH sont des acteurs reconnus de la transformation permanente de l’entreprise ».
Anne-Marie Cambourieu, DRH de Nexans, précise : « demain, le DRH sera un facilitateur du changement».
Chez Kering enfin, Belen Essioux Trujillo conclut sur cette formule éminemment positive : « demain, le DRH sera le carrefour entre les individus, et face au numérique, le garant de l’humain et de la cohésion interne. »
Comme risque, le mot rupture possède donc une force double et apparaît ombré d’une menace. Mais les ruptures peuvent aussi transporter la puissance d’une recomposition. Demain, le DRH, un entrepreneur interne ? Créateur de ruptures positives ? Evidemment, oui !